Forêt de montagne,

déséquilibre sylvo-cynégétique

 

Melles est une commune étendue sur un territoire de 4800ha, au creux de la soulane, à 700m d’altitude. Un seul axe de communication routier, très étroit, dessert la vallée, qui est soumise à un climat de type océanique à influence montagnarde .

L’environnement de la forêt est un pays qui s’étend sur un vaste territoire dépeuplé, où le tourisme n’existe quasiment pas, avec seulement cinq exploitants agricoles et aucun exploitant forestier en dehors de la commune qui exploite environ 50% des 2000ha de la forêt communale.

 

La vie des hommes se regroupe dans un petit village, à mi pente et ne dérange les animaux qu’à l’automne, à la saison de la chasse et des champignons. Les routes forestières connaissent une très faible fréquentation de véhicules. Cette forêt se scinde en deux régions forestières limitrophes, une dans la vallée dite du Maudan où est implanté le village de Melles, l’autre dans la vallée dite du Ger. L’état a acheté 29ha le 1/8/1901, créant la section R.T.M. de la Garonne, les premiers ouvrages de protection contre l’érosion dans la haute vallée.

L’aménagement forestier date de 1994, la pente en terrain régulier est environ 65 %. Les sols sont de fertilité moyenne. Les altitudes varient entre 930 et 1800 m, la plus fréquente 1300m. Le forestier averti, en traversant ces forêts, s’étonnera en constatant que si les vieux arbres sont nombreux, les bois moyens et surtout les semis sont rares, voire inexistants. Actuellement, on constate qu’ il n’ y a presque pas de hêtres de moins de 60 ans, en revanche, 80 % ont plus de cent ans, ce qui traduit un déséquilibre préoccupant.

 

Dans la forêt communale deMelles, la régénération naturelle est très fortement perturbée par la présence de cervidés.

 Les autorités d’attribution (ONCFS, FDC, ONF, DDAF) en 2000, ont voulu doubler le plan de chasse, mais il a été refusé par les acteurs, (absence de comptage sérieux prouvant ce surnombre, diminution trop importante de l’espèce, la jugeant partie intégrante du patrimoine naturel communal, comme le sont l’ours- animal emblématique réintroduit- le grand tétras, le lagopède et autres espèces présentes sur le territoire communal).

L’objectif de mon étude est d’essayer de déterminer une méthode qui permettra de retrouver un équilibre flore - faune - social, qui augmenterait la capacité d’accueil de cette forêt, de permettre la régénération, de façon pérenne, des semis de sapin, hêtre, essences de la traditionnelle hêtraie-sapinière, en évitant de réduire les populations de grand gibier, sans effectuer des travaux sylvicoles aux coûts importants.

Imaginer un nouveau terrain de médiation à proposer aux différents acteurs, assurer la pérennité de la régénération de cette forêt multifonctionnelle, donc trouver un nouvel équilibre sylvo-cynégétique, une conduite à long terme qui préserve les atouts, cette population de grand gibier,  tout en tenant compte des choix sociaux et des contraintes environnementales.

Il faut organiser cette régénération sans provoquer de dérangement des espèces de cette zone ours.

Pour déterminer comment protéger la régénération, j’ai mené en premier, une étude de la forêt pyrénéenne, des peuplements forestiers, puis une étude des cervidés, leur écosystème, des dégâts qu’ils occasionnent, à travers randonnées, cartes et revues. 

  cliquer puis chercher les cervidés

J’ai continué par une étude des activités des forestiers en faveur de la faune sauvage, avec les organismes coopérateurs, les lois, les actions en convention avec le ministère de la forêt .

 J’ ai poursuivi par une étude plus spécifique de la forêt melloise, à travers sa fonction de production :

son infrastructure (les pistes représentent 7,8 km. Densité : 5,11 km/100ha pour la partie productive du Ger, 2,37km/100 ha , se greffent 4,3 km de pistes de débardage pour la partie productive du Maudan)

le traitement préconisé par l’aménagement qui est respecté en ce qui concerne l’état d’assiette, les volumes réalisés sur les parcelles 43 à 55 ( 20 100 m3) sont nettement supérieurs à ceux prescrits par l’aménagement.( 14 400m3) et à la production escomptée (15 000 m3) comme la très belle parcelle 45 vendue 340f le m3 en 1992.

l’étude des peuplements: la forêt communale de Melles constitue trois séries en 65 parcelles .

La 1° série (1 366 ha) avec pour vocation la production de bois d’ œuvre de résineux et feuillus, la protection des sols et du biotope. La 2° série (84ha) destinée à l’affouage et à la protection du milieu. La 3° série (477,70 ha) hors cadre.

Les essences présentes sont par ordre d’importance le sapin (40%), le hêtre (45%), le chêne sessile (5 %) et les feuillus divers (Sorbier, bouleau, noisetier, saule..).

Les régimes et traitements sont, toujours par ordre d’ importance: Les peuplements hors sylviculture (44%),

la futaie irrégulière de hêtre et de sapin (12%),

la futaie sur souche de hêtre et de taillis de hêtre (10%),

la futaie jardinée de sapin et de hêtre claire (10%),

 les vides non boisables (9%),

la futaie à 2 étages de hêtre sur sapin (5%),

 

la futaie jardinée de sapin pur à dominante de gros bois(2%),

la futaie régulière de hêtres (2%),

la futaie régulière de sapin, petit bois et bois moyen (1%),

et les vides boisables (1%). 860 ha sont en sylviculture,

 soit 45% d’ espace boisé non exploité.

 

De façon générale, la durée de survie de ces peuplements ne devrait pas excéder 60 ans, avec une certaine régularisation du peuplement dans les gros diamètres due à un manque de coupe jardinatoire. Une constante de peuplement sur Melles est la rareté des petits bois et des perches. La régénération de sapin est faible et abroutie

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Mon étude a été réalisée d’abord en salle, puis en parcourant l’ensemble des parcelles pour vérifier si celles de référence étaient réellement représentatives du groupe. Au milieu de chacune des 8 parcelles sélectionnées, une placette circulaire de 10 ares a été implantée. Les données recueillies sont inventoriées dans un tableau récapitulatif. Et juxtaposée, l’analyse des dégâts réellement subits du fait des cervidés.

 Les cervidés commettent trois types de dégâts à différentes saisons

 l'abroutissement (Mâles et femelles prélèvent des bourgeons et des pousses jusqu’à une hauteur de 1,70m, ce qui provoque une forme défectueuse et une perte de croissance allant parfois jusqu’à la mort de l’arbre),

 

le frottis (Les cerfs se grattent de manière parfois très violente aux jeunes arbres, les frottant de tous côtés, détruisant de nombreuses tiges sur la future bille de pied),

 l’écorçage (qui a lieu en hiver, l’animal détache avec ses dents des lambeaux d’écorce qu’il consomme. L’annellation entraîne la mort de l’ arbre par parasitage.)

 

 

Une méthode pour déterminer cette population de cervidés a été demandée, puis récemment  mise en œuvre : la mise en place de bio-indicateurs de présence. Cela consiste à observer au lever du jour à partir de postes fixes sur une durée déterminée à l’avance les cervidés présents. Le soir du 18-06-2001, sur 11 points d’observation fixe, j’ai pu compter avec l’aide des agents de l’ONF et FDC, 215 animaux. Malgré un prélèvement qui est passé en dix ans de 12 à 105 cervidés, on a pu estimer, au cours de cette étude, douze cerfs sur cent ha à Melles. C’est trop; que faire ?

 

 

 Je propose de réaliser des aménagements afin d’augmenter la capacité d’accueil de la forêt, élever le potentiel au nombre de cervidés présents en stabilisant le nombre d’individus au cheptel actuel estimé lors des comptages;  le gibier  déplacé mais hors zone de production de bois, une pression intense de chasse aux cervidés sera  réalisée dans la zone de production de bois; on  préservera et améliorera alors les conditions existantes .

 

 Puis innover: revaloriser des essences appétentes, convertir des surfaces de futaie en taillis pour attirer de loin par l’impact visuel le gibier  déplacé, régénérer la forêt, réactualiser la taille des hêtres-têtards à  1,70m de hauteur afin que les animaux puissent s’alimenter de feuilles. Dans quelques années, éclaircir régulièrement et vigoureusement les peuplements : l’éclairement du sol favorisera la strate arbustive nourricière et très appréciée du  gibier ; maintenir les peuplements mélangés  tout en alternant les peuplements fermés, les feuillus pour la nourriture, la protection thermique et un sentiment de sécurité, les résineux de même mais en hiver.

 C’est à dire recréer un nouvel équilibre socio-sylvo-cynégétique.

 

Celui d’une forêt multifonctionnelle pyrénéenne